• AUTOPSY

    Hier soir j'ai veillé tard pour voir ce téléfilm diffusé sur Paris Première ..

    Car l'affiche était ma foi fort alléchante : Stéphane Freiss et Thierry Neuvic ... deux .. comment dirais-je ?? .. deux acteurs que j'adore ..

    Synopsis : Eric Mercadier, 45 ans, est commandant de police à la SRPJ de Lyon. Marié avec Anne, 40 ans psychologue dans les affaires sociales, ils ont un fils de 16 ans, Paco, un adolescent un peu rebelle. Eric est usé par ses années d'exercice dans la police. Il opère sur le terrain en association avec son binôme Sarah, dynamique lieutenant de police de 30 ans. La vie d'Eric bascule le jour où, lors d'une autopsie après un crime, son regard croise celui du nouveau médecin légiste, Emmanuel Rivière. C'est le coup de foudre entre les deux hommes. Désormais, Eric n'aura de cesse de faire avec cette nouvelle donne dans sa vie, lui l'hétéro convaincu.

    Le pitch était également particulièrement intéressant ..

    Je n'ai pas été déçue bien au contraire j'ai déjà envie de le revoir ..

    Car au-delà de l'histoire policière qui n'est que prétexte mais toutefois bien menée, l'histoire d'amour improbable entre ces deux hommes que tout sépare, déjà sur les tendances sexuelles de chacun, puis sur leurs façons de vivre, sur leurs façons d'être et de voir les choses, est très intense et très troublante ..

    Et on va vivre leur rapprochement irrésistiblement, subtilement ..

    Le film est réalisé avec beaucoup de retenue et de pudeur, beaucoup d'émotion, de silences, de regards, de sous-entendus ...

    Mis en scène très intelligemment par Jérôme Anger, le célèbre Dr Sylvestre, et surtout magnifiquement interprété par deux acteurs formidables .. Thierry Neuvic et Stéphane Freiss sont exceptionnels .. Stéphane Freiss en tête tourmenté par des sentiments qui le dépassent, paumé et perdu .. Thierry Neuvic ambigu à souhait .. tous deux particulièrement touchants voire même poignants ..

    Je regrette peut-être un peu la fin un peu triste mais une autre fin n'aurait pas été possible .. Celle-ci donne au film toute sa force ..

    Qui plus est, il évoque encore une fois l'homosexualité sans juger, sans tabou, sans concession ... (à l'instar du très réussi Comme les autres plus récemment ..) ..

    Quelques mots du réalisateur :

    L 'âme intérieure

    Le titre "Autopsy" est une petite boutade adressée à la psychanalyse. A travers la mise en scène des cauchemars, j'ai voulu que le spectateur pénètre dans le cerveau du personnage principal, Eric, afin d'explorer ses émotions, ses méandres. Pour moi, les cauchemars, les fantasmes sont efficaces car ils racontent beaucoup en très peu de temps. Ils nous bousculent, nous parlent et nous renvoient à ce que l'on peut éprouver certains matins au réveil, après une nuit jalonnée de rêves étranges. C'était très important pour moi de provoquer cet écho chez le téléspectateur.  

    Premières collaborations

    C'est la première fois que je travaillais avec ces acteurs. Je suis ravi et très fier du résultat. J'étais le chef d'orchestre et eux, les musiciens. Nous travaillions ensemble nos gammes. Thierry Neuvic (Emmanuel) s'est imposé à moi. Le risque était de tomber dans la facilité : choisir un acteur athlétique, viril, pour le rôle d'Eric. Thierry aurait très bien pu faire le flic. Mais, son interprétation était plus inattendue dans le rôle du légiste. Je connais Stéphane Freiss (Eric) de longue date puisque nous étions ensemble au Conservatoire. Nous n'avions jamais eu l'opportunité de travailler ensemble. Il fait à la fois preuve d'une grande fragilité et d'une volonté à toute épreuve. Quant à Sara Martins (Sarah) et Claude Perron (Anne), j'aime leurs univers différents et l'énergie qu'elles dégagent, chacune à leur façon. Enfin, coup de chapeau à Pascal Reneric (Régis Lartigues) que j'ai découvert lors d'un casting.

    Une histoire, des interprétations

    Comme dans L'abbaye du revoir, j'ai introduit plusieurs degrés de lecture de l'histoire. Certains téléspectateurs s'interrogeront sur l'issue du film. Pour moi, c'est une fin sublimée qui ouvre sur autre chose... L'un des discours du film est : "connais-toi toi-même". Si Eric avait une once de tolérance envers lui-même, s'il acceptait de "tuer le vieil homme" et de s'assumer, il serait plus heureux. Dans cette histoire, le vrai porteur du drame c'est lui. En général, les gens intolérants avec eux-mêmes accusent les autres. C'est ce qui se passe dans le film. C'est pour cette raison qu'il détruit énormément. En soupçonnant Emmanuel de manipulation et d'implication dans son enquête, il remet en cause leur relation.

    Artiste hédoniste

    Il est très important pour moi de rester un acteur, de faire de la mise en scène et de produire des films. J'ai trouvé mon équilibre sur le tard. Jean-Louis Trintignant m'avait confié un jour "il n'y a pas d'acteur heureux". Je pense qu'il a tout à fait raison. Dans ce métier, il y a toujours une insatisfaction. Moi, je cueille le plaisir où il est, en fonction des opportunités. Je suis tantôt comédien, tantôt réalisateur, tantôt producteur. Cela me permet de laisser mûrir des idées de mise en scène pour des films futurs. L'important étant de faire la télé qu'on aime.

    Interview croisée :

    Stéphane Freiss et Thierry Neuvic, acteurs

    Pour composer le couple formé par Eric et Emmanuel, il fallait deux hommes au charme différent mais complémentaire, et deux acteurs capables de mettre leur acuité et leur sensibilité au service d'une histoire pour le moins singulière. En choisissant Stéphane Freiss et Eric Neuvic, le réalisateur a réuni dans son jeu une paire d'as.



    Autopsie à l'Institut médico-légal

    Stéphane Freiss : depuis l'enfance, j'ai toujours nourri une angoisse pour ce qui est lié de près ou de loin au milieu hospitalier. L'idée d'entrer dans un institut médico-légal ne me réjouissait guère, d'autant que nous allions pénétrer dans ce qu'il y a de plus terrifiant... A l'instar d'Eric, il n'y a pas si longtemps que ma phobie s'est atténuée. Par exemple, lorsque j'ai tourné le rôle du chirurgien dans "La tribu" d'Yves Boisset, nous étions à l'hôpital de Poissy, dans le service des urgences qui reçoit les graves accidentés de la route pour l'ouest parisien.
    Pas vraiment rigolo... Avec le temps, j'ai appris à gérer puis à dépasser ce terrain psychotique. Mais, j'ai d'autres angoisses...
    Thierry Neuvic : C'est un milieu que je connais bien mais j'étais curieux de découvrir un environnement que l'on a peu l'occasion – et heureusement - de fréquenter dans sa vie. Le plus délicat a sans doute été de me retrouver face à un corps-mort qu'il ne faut plus considérer comme un être humain mais comme un objet d'étude.

    Accumulation de violence

    Stéphane Freiss : Il est évident que cette violence d'images et de propos qui nous environne à tout moment nous traverse de manière plus ou moins consciente. Toutes ces strates s‘accumulent ; faire ce métier permet de mettre des mots et d'évacuer par des émotions cette partie obscure, enfouie en moi-même. Dans le cas d'Eric, cette violence est indissociable de sa sexualité.
    Thierry Neuvic : Eric porte en lui deux types de violence : celle qu'il prend de plein fouet en raison de son métier de policier et celle qu'il a accumulée en lui, en réprimant ses émotions et en acceptant de vivre dans des schémas tout tracés. A un moment donné, la nature de l'individu ressurgit et la réaction est généralement virulente. Emmanuel est l'élément déclencheur de cette overdose.



    Homosexualité évidente ou latente

    Stéphane Freiss : Eric s'est construit une vie autour de sa femme, Anne, de leur enfant et de son métier. Il s'est appuyé sur cette structure traditionnelle solide qu'il pensait indestructible. Il a toujours contenu cette fêlure qu'il porte en lui mais préfère l'étouffer, acceptant cet univers sans jamais essayer de se débattre. Cette tentation de l'homosexualité attendait le bon moment pour se révéler.
    Thierry Neuvic : Avec sa stature et la force naturelle qu'il dégage, Emmanuel peut donner l'impression d‘assumer sa vie et notamment sa sexualité. A cette solidité physique s'ajoute un métier qui le confronte quotidiennement à la mort et qui l'a endurci. Mais cet aplomb lui sert à vivre et à tenir debout car psychologiquement c'est un homme extrêmement fragile. Emmanuel est souvent seul. Sa vie sociale se résume sans doute à la fréquentation de boîtes de nuit appréciées des homosexuels. Lorsqu'il rencontre Eric, il n'a pas de certitudes sur leur relation mais, d'instinct, il essaie de se rapprocher de lui car il est immédiatement séduit. Il deviendra cependant rapidement victime de ses propres émotions envers l'homme qu'il aime.

    Scènes osées

    Stéphane Freiss : Elles sont devenues faciles à jouer à partir du moment où les sentiments amoureux que j'imaginais et interprétais étaient ceux que j'aurais éprouvés pour une femme ! De toute façon, Eric ne se sent pas homosexuel. La scène où il devient agressif envers les autres homosexuels qui le provoquent dans le bar le prouve bien. Il est – et c'est ce qui le trouble - amoureux d'un être qui se trouve avoir le même sexe que lui. Le choix de Thierry Neuvic pour jouer Emmanuel a aussi été déterminant. Il est difficile d'accepter un tel rôle si l'on n'éprouve pas d'affinité avec son "partenaire". Derrière un apparence de rugbyman, Thierry est un homme et un acteur fin, délicat et très à l'écoute.
    Thierry Neuvic : Les scènes de baisers ne sont jamais faciles, quel que soit le partenaire, homme ou femme. Dans le cas d'Autopsy, j'ai éprouvé une certaine appréhension. Heureusement, Stéphane et moi avons choisi la meilleure voie, celle de l'amusement. Passés les débuts où l'on se moque un peu de soi pour désamorcer la tension, nous finissions, au clap final, par en rire.

     

    Impressions

    Stéphane Freiss : je comprends l'amitié masculine et je la vis avec beaucoup de plaisir. J'apprécie cette tendresse, ces échanges, cette complicité qui peuvent exister entre deux hommes. Mais moi, personnellement, je n'ai pas envie d'aller au-delà... pour l'instant !
    Thierry Neuvic : J'ai des amis homosexuels et je me suis déjà fait draguer par des hommes, mais cela ne me choque pas plus que si c'était une femme. Comme Stéphane, je crois qu'il est impossible de prétendre que cela n'arrivera jamais. Je n'en sais rien et j'ajouterais, tant mieux, car cela prouve que notre destin n'est pas tracé par avance.

    Enjeux

    Stéphane Freiss : J'aime les challenges qui dérangent. Notre métier consiste aussi à ne pas forcément aller dans le sens des choses qu'il nous plait d'entendre. J'assiste ensuite en spectateur aux conscéquences de mes choix. Je n'ai pas pour autant l'impression de réaliser un acte révolutionnaire ! Je m'amuse à bouger des pions. Nous ne sommes plus dans les années 80, à l'époque où les films de Paul Vecchiali évoquaient l'homosexualité.
    Thierry Neuvic : C'était assez audacieux de la part de Jérôme Anger et de France 3 de se lancer dans un tel projet. J'étais d'autant plus motivé que je trouve que nos sociétés occidentales sont en pleine régression. Certains sujets redeviennent tabous. Nous sommes de moins en moins tolérants. Ce manque de profondeur véhicule inévitablement de l'incompréhension.

     

     


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